mercredi 1 novembre 2006, 22h17
Des casseurs présumés relâchés en Seine-et-Marne: polémique dans la police
Par Stéphanie LEROUGE
MELUN (AFP) - La décision du patron de la police de Seine-et-Marne de relâcher vendredi une soixantaine de personnes interpellées après des dégradations de véhicules a suscité mercredi la demande d'un "rapport circonstancié" par le ministre de l'Intérieur et la colère de syndicats de police.
"J'ai demandé au directeur général de la police un rapport très circonstancié pour comprendre ce qui s'est passé", a déclaré Nicolas Sarkozy devant la presse à Marseille, où il s'était rendu au chevet de la jeune femme grièvement brûlée samedi dans l'incendie criminel d'un bus.
Le ministre, qui s'exprimait après que trois syndicats de police eurent manifesté leur colère face à la décision de relâcher ces jeunes âgés de 18 à 20 ans, ne s'est pas prononcé sur le fond, estimant qu'il fallait "tirer au clair ce qui s'est passé" et notant qu'il y avait eu, dans cette affaire, "une rixe entre bandes" et "non une attaque contre des forces de l'ordre ou contre un bien public".
Vendredi soir, une soixantaine de jeunes hommes armés de battes de base-ball, gomme-cogne (pistolets tirant des balles en caoutchouc), bombes lacrymogènes avaient déambulé dans Savigny-le-Temple (Seine-et-Marne), pressés d'en découdre avec une bande rivale, selon le directeur départemental de la sécurité publique, Jean-Claude Menault.
Soupçonnés d'avoir dégradé sur leur passage des véhicules, ils ont été encerclés et menottés par les policiers après avoir vraisemblablement abandonné leurs armes à une quarantaine de mètres.
Ils ont ensuite été relâchés sur décision de M. Menault, venu sur place, et qui a confirmé mercredi le récit des faits publié par Le Parisien.
Son attitude a suscité les protestations de trois syndicats de policiers, Synergie, l'UNSA-police, et le SNOP qui ont demandé une enquête de l'inspection générale de la police nationale (IGPN).
"Cette décision (...) est scandaleuse pour les victimes et les collègues qui sont intervenus", a déclaré à l'AFP Patrice Ribeiro, pour Synergie, second syndicat chez les officiers de police.
Le Syndicat national des officiers de police (SNOP - majoritaire) s'est dit "surpris de la décision" de relâcher "sans autre forme de procès et de manière grand-guignolesque 60 délinquants".
"Je souhaite que le préfet prenne ses dispositions et qu'il diligente une enquête", a pour sa part affirmé Joaquin Masanet, pour l'UNSA police, second syndicat chez les gardiens de la paix.
"Rien juridiquement ne tenait", s'est justifié Jean-Claude Menault lors d'une conférence de presse faisant valoir qu'"aucune infraction commise" ne pouvait être imputée "à quelqu'un" en particulier, et qu'il n'y avait donc pas "matière à garde à vue".
"Il aurait été très difficile de prouver que tel individu était pourvu de telle arme, avait dégradé telle voiture. Je n'allais pas mettre en garde à vue soixante individus, et défaire mon dispositif de sécurité au début d'un week-end +chaud+, pour que tout le monde soit relâché le lendemain", a expliqué M. Menault.
Selon Jean-Pascal Stadler, de l'UNSA-police régionale, des témoins des dégradations se trouvaient sur les lieux et auraient pu désigner les fauteurs de trouble. M. Menault a fait valoir lui que si treize plaintes pour dégradation avaient été enregistrées depuis vendredi, aucun témoin ne s'était présenté. Il a toutefois expliqué qu'une enquête préliminaire était ouverte et qu'on saurait "chercher les auteurs et les déférer à la justice".
Le procureur de la République de Melun, Serge Dintroz, lui a apporté son soutien, estimant que "mener soixante gardes à vue pendant 48 heures en même temps, dans une procédure où il faut tout démontrer parce qu'a priori personne ne va reconnaître ce qui lui est reproché, c'est mission impossible".
http://fr.news.yahoo.com/01112006/202/des-casseurs-presumes-relaches-en-seine-et-marne-polemique-dans.html